Chez
les gens de formation judéo-chrétienne, la pauvreté apparaît souvent comme une
vertu, tandis que la richesse apparaît comme un vice, voire une tare. On
a beau se croire libéré des anciens enseignements qu’ils laissent souvent des
engrammes profonds et tenaces dans l’inconscient. La «Bible» ne
manque pas de propos qui invitent à se méfier de la richesse et des riches,
mais qui recommandent d’accorder beaucoup d’attention aux besoins des pauvres,
ce qui serait une condition du salut, car, est-il précisé, «l’aumône remet les
péchés». Un extrait de l’«Ecclésiastique» (8, 1-2) peut
résumer la majorité des maximes bibliques relatives à la richesse, car il y est
dit, outre que les biens attirent les parasites et rivent à la terre : «Ne
te querelle pas avec un riche de peur qu’il n’ait plus de poids que toi;
car l’or a perdu bien des gens et a fait fléchir le cœur des rois.»
Pourtant, il y a fort à parier que, à
moins d’être sincère, sage et amoureux, faire l’aumône sans discernement peut
mener à la ruine et à la régression, si elle encourage des travers ou perpétue
l’inconscience. Car il a été dit ailleurs : «Donnez à ceux qui ont,
car, à ceux qui n’ont pas, même ce qu’ils ont leur sera enlevé.»
Malgré
qu’un proverbe commun assure que pauvreté n’est pas vice, le sentiment de
manque ou de pénurie peut tirer son origine d’une erreur de compréhension,
d’une apathie intérieure ou d’une juste rétribution, un propos qui ne déprécie
personne en lui-même. Ce sentiment traduit souvent un manque d’amour de
soi, une sécheresse du cœur ou une étroitesse du mental. On est trop
porté à attribuer la pauvreté à un manque de justice distributive, soit à une
manque d’ouverture du cœur qui amène les mieux nantis, individualistes et
égocentriques, à thésauriser, à accumuler et à monopoliser l’argent et les
biens.
Dans
le phénomène de la pauvreté mondiale, il y a de cela, mais il y a bien
davantage un manque de compréhension de la dynamique de la vie qui amène à
mépriser la créativité personnelle et la prise en charge individuelle.
Bien des gens pauvres souffrent d’un atavisme familial qui les amène à se
croire purement et simplement les victimes d’un sort injuste, d’où ils ne
pourraient rien changer à leur situation. C’est sûrement ce qui explique
les expressions défaitistes, peu inspirantes, qu’on a formulé au cours des
âges : quand on est né pour un petit pain, on n’est pas né pour un
gros; quand on est né valet, on n’est pas roi; chacun doit se
résigner à son sort.
Une
erreur plus grande que la pauvreté serait de concevoir les riches comme des
gens qui ont consacré toutes leurs énergies à l’aspect matériel de l’existence,
mais qui n’ont pas fait ce qu’il faut pour s’élever. C’est l’idée
parasitaire qui peut hanter le psychisme de certains pauvres qui ignorent que
la vie est abondance en elle-même. L’appel à l’évolution n’est pas lancé
uniquement au pauvre et il n’est pas facilité aux démunis. De ce fait, on
a généralement tort de croire que le pauvre peut gagner son ciel plus
facilement que le riche.
Tout
est question de perspective : en elle-même, la richesse n’est ni un idéal
ni une tare. La pauvreté non plus. Conformément à la loi du libre
arbitre, il appartient à chacun de faire ses choix. Comme la richesse, la
pauvreté, considérée en elle-même, n’élève ni n’abaisse. Mais la
richesse, qui ne résulte pas toujours de l’exploitation éhontée d’autrui et de
la Nature, ne peut être le résultat d’une récompense ni d’un décret cosmiques,
bien qu’elle puisse s’expliquer par un codage antérieur à l’incarnation.
Mais celui qui se serait codé une expérience de pénurie, comme leçon de vie, ne
pourrait qu’avoir codé la nécessité de s’en tirer le plus rapidement qu’il lui
serait possible.
Quoi
qu’il en soit, le riche et le pauvre ont droit à la lumière, bien que leurs
défis soient différents. Dans la vie, tout est question de quête
d’équilibre et d’harmonie : le pauvre doit apprendre à se libérer de
ses limites, tandis que le riche doit veiller à partager amoureusement ses
biens; le malade doit veiller à comprendre le sens de ses
difficultés et les appliquer pour guérir, tandis qu’il permet au médecin
d’exercer sa compétence et de l’améliorer; l’employé ou le manœuvre doit
apprendre à bien servir un plan d’affaires ou une communauté d’intention et à
s’élever dans l’échelle des responsabilités, tandis que le patron doit
apprendre à faire un bon usage du pouvoir, notamment en respectant les
collaborateurs de sa prospérité. Tout est question de jeu de rôle pour
permettre la diversité des expériences. Ce qui n’invite pas à se
cantonner dans le rôle le plus difficile par sa résignation à son destin.
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